Association ‘’Anciens Aérodromes’’
Site Eolys- Aérodrome de Merville-Calonne LFQT
Rue de l’Epinette, 62136 LESTREM-France
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équipé. De là, on a mené des missions offensives
contre l’armée allemande, et les pertes ont
continué. On manquait terriblement d’avions « bons
de guerre ». Plusieurs fois, des pilotes sont allés en
chercher à Brétigny.
Dans les notes que m’a aimablement
transmises Jacques Normand, le fils de mon ami
Roger Normand, j’ai relevé que le 31 mai, l’avion du
sous-lieutenant Legrand, qui avait été « mon »
pilote, avait été mis en feu par un chasseur
allemand, alors qu’il attaquait des panzers à très
basse altitude au sud-ouest d’Abbeville. Cabrant
pour remonter à 200 m d’altitude, le pilote avait
permis à son nouveau mitrailleur, l’adjudant-chef
Poilbout, de sauter en parachute : Legrand sortira
indemne de l’écrasement de son avion, le Breguet
693 n°35, tandis que Poilbout sera fait prisonnier.
Tout en soutenant un combat sans grand
espoir, nous sommes passés à Chartres, puis
remontés quelques jours à Beauvais, plus près de
la zone des combats. Les avions étaient plus
nombreux, les tactiques d’attaque s’amélioraient,
les résultats des missions étaient bien meilleurs,
avec moins de pertes malgré le renforcement de la
présence de la Luftwaffe.
Et puis, le 13 juin, tout le front a craqué.
Une retraite chaotique
Le II/54 a quitté Chartres sous la mitraille
des chasseurs allemands, pour Châteauroux. Il
devint dès lors difficile, voire impossible, d’organiser
des missions d’ampleur, alors que la tactique était
maintenant bien au point.
Comme les Allemands avançaient très vite
en direction du sud-ouest, notre repli s’accéléra
vers St Jean d’Angély, et les missions ne furent pas
nombreuses : on ne nous donnait pas d’objectifs,
l’échelon terrestre suivait irrégulièrement, et la
disponibilité des avions était faible.
Autour de La Rochelle (NDA : terrains de
Dompierre, La Jarne et Bourgneuf), toutes les
formations sur Breguet 693 et 695 se trouvèrent
rassemblées du 16 au 19 juin, date à laquelle le
18
ème
GBA –ou ce qu’il en restait- partit pour
Landes-de-Bussac. On évoquait par ci par là un
possible repli en Afrique du Nord via Marseille, mais
ce n’était pas réaliste. Il était bien trop tard. Et puis,
coupés des usines, comment aurait-on entretenu
des avions fatigués ?
L’Armistice nous surprit entre Mont-de-
Marsan et Toulouse-Francazal. C’était la fin. Les
avions ont été volontairement immobilisés et
désarmés. On nous a dit de découdre nos boutons
et galons de nos uniformes… tout en restant
militaires. J’ai été rattaché au 2
ème
Groupe et nous
sommes partis à Lézignan-Corbières, où je devins
sous-officier d’ordinaire, aux ordres du lieutenant
Lagrasse, ancien pilote du I/54, chargé de
l’intendance.
J’étais sergent, mais conduire une 202
dans les vignobles pour collecter des rutabagas et
des topinambours ne m’enchantait pas. Un dernier
coup de piston insistant me permit de me faire
muter dans les services d’intendance de la 1
ère
Région Aérienne à Aix-en-Provence, plus près de
mes chers amis de Vinon sur Verdon. C’est là que
je fus démobilisé définitivement, le 14 mai 1942.
La guerre terminée
Les survivants du GBA 18 se sont souvent
réunis dans un café du boulevard Bonne-Nouvelle à
Paris, au moins une fois par an. Même ceux qui
étaient devenus généraux fraternisaient avec nous.
Et puis, la mort faisant son œuvre, le nombre de
participants a décru au point de faire cesser ces
retrouvailles. En dehors de ces instants émouvants,
c’est la première fois depuis soixante-dix ans que je
parle de mes souvenirs…
Henri MINOT (à droite) et notre collègue Pierre
LABAUDINIERE en novembre 2010
Remerciements
La rédaction remercie chaleureusement M. Patrick
VINOT PREFONTAINE, Président de la Branche
Française d’Air-Britain de nous avoir autorisé à
publier cet article paru dans le n°255 de la revue
TRAIT-D’UNION