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Retour à Croydon le 12, le Ministère de l’Air mène son enquête avec les pilotes et un
observateur. Ce dernier essaye d’enfoncer la porte à coups d’épaule, elle s’entrouvre d’une
dizaine de centimètres, ensuite, encordé et de toutes ses forces, il arrive à mettre un pied sur la
marche d’accès mais est repoussé à l’intérieur du vestibule. Conclusion : les normes de
sécurité ne doivent pas être revues… ce qui signifie que le
Capitain
n’a pu tomber par
accident et, partant, n’a pu se suicider.
Le 19 juillet, un chalutier hisse un corps en décomposition, vêtu d’un caleçon, chaussettes et
souliers à proximité du Cap Gris-Nez : c’est Loewenstein ! Il est identifié par sa montre et sa
dentition ; une autopsie privée renseigne une grave blessure à l’estomac, son ossature est
fracassée sans doute à cause de l’impact avec l’eau d’une hauteur de 1.200 m. Pas de signe de
poison ni de violence avant la chute… Loewenstein repose dans l’ancien cimetière de
Bruxelles situé à Evere, un espace de recueillement extraordinaire, de l’ordre du cimetière du
père Lachaise à Paris.
L’Hôtel Loewenstein à Bruxelles (RD)
Reprenons au moment où les passagers et pilotes ont constaté la disparition de Loewenstein.
Drew entame une série de cercles à basse altitude afin d’apercevoir son boss dans la Manche.
Puis, il pose le trimoteur sur la plage : hypothèse qui est répétée depuis 80 ans !
Drew, selon la presse de l’époque, est un ‘
ace
’ de la Grande Guerre.
Il est décédé en 1936 à l’âge de 34 ans pour cause de maladie ; il aurait été donc pilote
confirmé en 1918 à l’âge de 16 ans. Il est appelé ‘capitaine’ au sein de la société Imperial
Airways à laquelle est acheté le Fokker de Loewenstein. Il poursuivra avec quelques déboires
sa collaboration avec cette compagnie sur des hydravions. Un ‘
ace
’ du Royal Flying Corps à
16 ans ? Difficile à avaler, sans toutefois mettre en doute sa virtuosité. Seules des recherches
au
National Archives
anglaises pourraient préciser son curriculum militaire et son âge exact.
Drew décide d’atterrir sur la plage de Saint-Pol-sur-Mer puisque la marée est basse. Est-il fou
au point de poser un avion de plus de quatre tonnes sur une plage humide où se trouvent sans
doute des bâches, et le faire décoller plus tard ? La basse mer est à 21h24 et nous sommes aux
environs de 18h30, soit à la moitié du reflux ce mercredi 4 juillet 1928 en soirée.
Non, Drew devait connaître une meilleure solution, celle d’une piste d’aviation à 200 m de la
plage : l’aérodrome militaire de Saint-Pol ! As de 14-18 ou pilote d’Imperial Airways, il
devait connaître cette piste abandonnée mais considérée terrain de secours… puisque la ville
de Dunkerque avait en projet à cette époque de réhabiliter l’aérodrome pour une utilisation
commerciale. Il s’attendait aussi à ne pas y rencontrer un chat. Entendons-nous bien : il s’agit
d’une immense plaine gazonnée d’où on décolle selon la direction du vent, manche à air à